Ce jour-là, de l'autre côté de l'Atlantique, je me réveillais à 7h, comme tous les lundis et mardis, jours de stage à l' Ambassade. Ma roomate, Alex, se levait la première et allait prendre sa douche dans la salle de bain commune. Ce jour-là, j'optais pour des chaussures confortables, un pantalon noir et un top rouge. Il faisait beau. Une température idéale. L'été indien à Washington DC. Un petit-dej au self : typiquement américain : café à l'eau, céréales, bacon, jus d'orange.
Je rejoignais ma collègue américaine, Sarah, qui était ma binome au boulot.
On se raconte notre week end, les musées gratuits de Wahington, les sorties, le choc culturel, nos amourettes.
8H15 : départ en bus. Nous sommes accompagnés de 2 autres étudiants français qui ce matin tentent un nouveau trajet. L'arrêt de bus est devant le campus. On s'installe au fond du bus face à face. On plaisante, on s'imprègne. L'atmosphère, les rues, les jardins, les gens, l'Amérique!Nous ne sommes arrivés qu'il y a 3 semaines. Changement de bus pour Sarah et moi. Plus beaucoup de cigarettes mais ça devrait passer... mon lunch bag à la main, on patiente dans les beaux quartiers pour prendre notre 2eme bus.
Arrivée à l'ambassade, on montre notre badge de stagiaire au poste de sécurité. Nous sommes les premières arrivées. Installation, check des mails, du répondeur. Impossible de le faire fonctionner. Ma responsable arrive :
"Lisa, I have a problem with the answering mach'....Je ne peux finir ma phrase...
- Ce n'est pas le moment , il vient de se passer quelque chose à New York! me confie-t-elle avec son accent...;
Dans un premier temps, je ne réalise absolument pas, je comprends ce qu'elle m'explique, mais je ne réalise pas, je ne vois pas très bien comment ça peut se traduire : des avions sur New York? On va tres vite dans la salle de conférence : et là ... les images de CNN. en boucle. La qualité de la TV est mauvaise. On nous propose d'aller voir tout ça dans le bureau d'un diplomate. 5 minutes.? 10 minutes devant cette TV. je ne sais plus.. Je ne comprends plus rien de ce que disent les journalistes. Je comprends par l'image. Je me rue vers les sites français d'information qui mettent 1 heure à se télécharger : libé, le monde, tf1. Je lis, j'actualise, je veux davantage d'informations.
Lisa revient et me dit qu'un 3eme avion vient de s'écraser sur Washington. La peur débarque. Entière, glaciale. Une autre stagiaire yougoslave m'explique dans un anglais approximatif ce qu'elle vient de lire sur le web : d'autres avions détournés seraient en train de tourner dans le ciel de Washington. Au même moment des bruits de moteurs d'avions retentissent (NB : bruit habituel à Washington, les avions volent très bas ds le ciel de cette ville). Je m'imagine dans un film. Sur la guerre de 40. Les bombardements. Un film : Anne Franck. J'entends ces bruits. Me dis que c'est fini. Il y en aura un pour nous. L'ambassade est une cible potentielle. Des militaires en uniforme que je n'ai jamais croisés jusqu'alors courent dans les couloirs. Un diplomate vient chercher 2 de nos PC's pour "la cellule de crise" sans aucune autre forme d'explications.
Un policier lui, vient demander à tous les conducteurs de sortir leur voiture du parking et d'aller la garer dans la rue : pas "mesure de sécurité".
J'envoie un mail à mes parents et à ma soeur, les larmes aux yeux. Les autres ne peuvent pas me voir, je sus dos à eux. J'ai peur. Ce premier mail dit ceci :
"Bonjour, je vous rassure, l ambassade va bien...
En revanche, c l ebullition ici, tout le monde est sur CNN... I. et T., vous pouvez passer un petit coup de fil a papa et maman pour dire que tout va bien !!!!
J essaierai d appeler de l ambassade + tard...
Bises
Avec du recul, je trouve ce mail plutôt serein. J'essaie d'appeler la France. Les lignes sont bloquées. Mon père répond à ce mail, veut me parler à tout prix. Je sors fumer des dunhill achetées à la hâte. Dégueulasses. Je sors de l'immeuble. On nous interdit d'aller plus loin. j'entends les avions. Je n'ose imaginer ce qu'il se passe dans la rue, derrière les arbres. Je tremble de tous mes membres. Je rentre. Les murs du bâtiment me rassurent.
L'angoisse monte. Je suis bloquée à l'ambassade, loin de tous, des avions au-dessus de la tête, je ne peux pas parler à mes parents, ni à mes proches. Je me dis très sincèrement à cet instant là : je vais mourir.
C'était le matin du 11 septembre 2001.
Ce jour-là, de l'autre côté de l'Atlantique, je m'étais réveillée à 7h, comme tous les lundis et mardis.
She
Commentaires :
Re:
j'étais en pennsylvanie au moment des faits, tout près de l'endroit où un autre avion s'est écrasé... quand à mon père, il était à new-york, dans le financial district, lieu où il travaille... tout s'est bien terminé, même si mon père a eu très peur pour lui, mais je te dis pas les sueurs froides du reste de ma famille....
Re:
Je peux imaginer tu sais!!!!!
Tu étais étudiante là-bas?
Au fait, quelle est l'adresse de ton blog?
Re: Re:
quand à mon blog, je l'ai fermé il y a six mois, mais je vais peut-être en réouvrir un bientôt!
bonne continuation